Tirailleurs, une histoire collective. Ch10, la démobilisation, version 2.

, par Haphsatou Agne

Ce chapitre de "Tirailleurs, une histoire collective" a été écrit par la classe de 1ère STGM du lycée Albert-Camus à Bois-Colombes, sous la direction d’Aphsatou Agne, professeure d’histoire-géographie. A votre tour, vous pouvez faire contribuer une de vos classes à cette histoire collective (lien vers l’appel à projet) et découvrir le journal de bord de ce projet d’écriture.

Après l’offensive contre la Hunding-Stellung dans la Marne les 25 et 26 octobre 1918, le 31e Bataillon des Tirailleurs sénégalais reçoit l’ordre de se replier. Adiouma Diouf est parmi les quelques 2000 soldats de ce bataillon qui reçoit l’ordre de démobilisation. Son bataillon avait participé à cette offensive en soutien à la 46e Compagnie du Régiment d’infanterie.

Le 2 novembre 1918 : ordre de démobilisation.
Etabli à Epernay, le bataillon attend plusieurs jours le départ pour Marseille avant de rentrer sur le continent africain. Adiouma Diouf est un sergent, wolof, originaire du Sénégal qui a pu participer à des combats mémorables durant la guerre et notamment la défense de la ville de Reims. Il est à la tête de la 1ère section de la 2ème compagnie du 31ème BTS. C’est maintenant le temps du retour qui se fait longtemps attendre. Le 16 novembre, l’Etat-major doit annuler le transfert vers Marseille : la commission des réseaux informe l’armée que les moyens de transport ne sont pas prêts à faire transiter autant de soldats. Adiouma, en tant que sergent doit informer ses hommes : ils resteront cantonnés à Mardeuil, commune située à 40 minutes de marche d’Epernay. Le 30 novembre, le sergent Adiouma Diouf peut enfin rassembler ses troupes pour la gare d’Epernay. De manière échelonnée, sa compagnie est celle qui quitte Epernay en premier pour se rendre à Marseille.

Le trajet de retour

Départ des 1ère et 2è compagnies à midi précise. La route est longue : par le train, Adiouma voit passer les champs dévastés par les bombardements. Les souvenirs lui reviennent en tête depuis la première mobilisation et les premiers ordres militaires donnés par le Commandant Etienne. Plus de 780 km plus tard, le 2 décembre 1918, à 14h, la compagnie est arrivée à Marseille et installe ses quartiers au camp de la Delorme. Le sergent Diouf conduit ses hommes vers les quartiers situés au nord de la ville : c’est là qu’était situé le camp militaire de la Delorme aujourd’hui transformé en jardin public nommé “l’Oasis”.

Entrée du camp militaire La Delorme à Marseille

Le camp de La Delorme était pendant la Première Guerre mondiale un camp de transit pour l’armée et notamment pour les troupes coloniales. À Marseille, la vie au camp est difficile ; l’Etat- major ne peut autoriser le retour définitif pour chacun dans son village. Ainsi, depuis l’arrivée début décembre jusqu’au 31 décembre, on compte des pertes importantes chez les tirailleurs sénégalais : 110 malades de la grippe espagnole, de bronchites, de pneumonies, de pleurésie et 3 morts. On ne connaît le détail entre les pertes chez les soldats européens et sénégalais. On peut supposer que c’est à la suite de ces pertes que le sergent Adiouma Diouf est promu adjudant. L’année 1919 commence, la compagnie à laquelle appartient la section d’Adiouma est toujours à Marseille. L’adjudant Adiouma Diouf étant instruit, il prend le commandement d’une section de jeunes tirailleurs non instruits qu’il doit former. Comme l’indique le journal des marches, les 4/7è des tirailleurs sénégalais sont des jeunes non instruits. Il a regroupé des tirailleurs Peuls, Sérères et Diolas. C’est un tirailleur peul originaire de Saint- Louis au Sénégal, parlant peul et wolof qui est chargé de traduire les instructions lors des exercices. Un autre soldat originaire de Kolda en Casamance parlant wolof fera la traduction en langue diola. Les exercices du quotidien sont : éducation physique, exercices sans charge au début puis avec charge et avec armes.
Alors qu’un détachement du 31è BTS est envoyé à St-Raphael en soutien du 73ème bataillon ; le reste du BTS organise la vie du camp : les tirailleurs sont affectés aux piquets d’ordres qui organisent les départs vers le Sénégal. La section d’Adiouma Diouf a bien progressé dans le maniement des armes et la maîtrise de la langue. Elle est choisie pour escorter les responsables politiques en visite en Algérie après la sécheresse agricole de 1917/1918. De retour au camp de La Delorme à Marseille, l’adjudant Adiouma est chargé d’organiser le retour des premiers tirailleurs vers le Sénégal. Désormais le 31è BTS est la fusion des 31ème, 54ème et 77ème BTS.

22 avril 1919  : les permissionnaires embarquent pour le Sénégal sur le “Phrygie” ; 2 adjudants, 29 sergents, 86 tirailleurs. Le “Phrygie” est un paquebot de la Compagnie maritime Paquet d’une capacité de 600 hommes.

Carte du paquet le Phrygie

En mai, 250 TS gradés et tirailleurs embarquent à bord du “Louis Fraissinet” pour le Sénégal. En reconnaissance de sa bravoure et son efficacité, le Commandant Etienne propose à Adiouma Diouf de rester en métropole et de “contribuer à la gloire de la plus Grande France”.

Son commandant lui confie que la paix ne sera pas facile à imposer à l’ennemi... En attendant, il reste 1487 soldats tirailleurs encore à Marseille et nombreux parmi eux nécessitent d’être scolarisés. Adiouma peut jouer un rôle dans ces écoles de soldats.

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