Cédric Naudet, « Expliciter les savoirs structurants de la géographie scolaire », 2023, thèse de doctorat en géographie et sciences de l’éducation à l’Université Paris-Cité sous la direction de Caroline Leininger-Frézal et de Jean-François Thémines. |
Mots clés
Explicitation ; inégalités d’apprentissage ; malentendus socio-scolaires (erreurs et mauvaises interprétations liées au bagage social, culturel et cognitif des élèves) ; géographie expérientielle
Une thèse à la frontière de la didactique, de la géographie et de la sociologie
J’ai été entre 2014 et 2023 enseignant dans un lycée de l’Essonne accueillant une forte proportion de familles défavorisées, après avoir été pendant sept ans titulaire en zone de remplacement dans l’académie de Grenoble. Ces deux temps de mon parcours d’enseignant m’ont confronté à une hétérogénéité très importante de publics, du lycée très favorisé de centre-ville au collège en Réseau d’Éducation Prioritaire, en passant par des établissements situés en zone rurale ou périurbaine. Ces contextes divers ont alimenté mes réflexions sur les inégalités d’apprentissage et de réussite entre les élèves. J’ai cherché des éléments de réponse dans la sociologie et les sciences de l’Education et, en 2017, j’ai eu connaissance de l’existence du Master de Didactique des disciplines de l’Université Paris-Diderot. Interrogeant ma propre pratique, j’ai été amené au cours de mon mémoire de Master de didactique à questionner les modalités de transmission des notions et concepts dans l’enseignement de la Géographie, en utilisant le prisme de l’explicitation. Pour la thèse, j’ai investigué dans quatre établissements d’île de France aux caractéristiques socio-scolaires complémentaires. Les difficultés récurrentes à lutter efficacement contre les inégalités scolaires m’ont interpellé. J’ai mis en évidence l’importance des implicites à l’œuvre dans l’enseignement de la géographie du secondaire. C’est pourquoi, la partie didactique de la thèse a consisté à créer des scénarios faisant appel à l’expérience personnelle des élèves comme appui à la conceptualisation.
La problématique de la thèse et les éléments de réponse
Ma recherche doctorale a travaillé le prisme de l’explicitation, dans la lignée des propositions de la sociologie critique. Selon cette approche, des malentendus socio-scolaires, liés aux multiples implicites au long de la chaîne curriculaire depuis les programmes jusqu’à la classe), génèrent des inégalités. Il s’est agi tout d’abord de justifier l’utilisation de ce prisme, en le croisant avec celui de savoirs structurants – les finalités, les méthodes et les objets de la discipline. Une analyse curriculaire de deux concepts clés de la discipline -métropolisation et ressource-, a permis de démontrer la dimension systémique des implicites. C’est pourquoi la thèse a réfléchi à des pistes d’explicitation. Deux conditions sont apparues propices à cela. La première est d’articuler l’expérience du quotidien des élèves avec les savoirs scientifiques. La deuxième condition consiste à organiser une métacognition afin que les élèves s’explicitent à eux-mêmes les savoirs. Des interactions entre les élèves de type débat, accompagnés d’une phase réflexive individuelle permettent d’accompagner la conceptualisation.
Une piste d’exploitation pédagogique avec les élèves
- Des capsules vidéos présentant des exemples de démarches expérientielles développées par le groupe Pensée spatiale de l’IREMsont présentées sur Strabon : https://histoire.ac-versailles.fr/spip.php?article1955 et développée dans un article scientifique ici : https://eurogeojournal.eu/index.php/egj/article/view/271
- D’autres articles sur Strabon proposent quelques pistes de réflexion sur l’explicitation :
- Un ouvrage aux presses universitaires de Rennes sera publié au début de l’automne 2024
Pistes des développement professionnel
Le master de didactique des disciplines de l’UPC, auquel on peut s’inscrire via le PAF, a été pour moi un formidable levier pour développer une méta-analyse sur mes pratiques d’enseignants. J’y ai pris goût de la recherche et j’ai été recruté comme enseignant chercheur à l’Inspe de Créteil à la rentrée 2023. Je ne peux qu’encourager les collègues à envisager au cours de leur carrière un temps de recul par le biais d’un master. A l’UPEC, nous avons également d’excellent master « pratiques et ingénierie de la formation » : un préparant à la fonction de formateur académique, l’autre, ouvert cette année, « éducation au développement durable, former à transformer les pratiques ».